Récit de trail #1 : Trail aux Etoiles (63 km / 2600 D+)

  Présentation générale



LIEU : LE VIGAN dans le Gard

EVENEMENT : CEVEN’TRAIL

DISTANCE : 63 km

DENIVELE POSITIF : 2600 D+



Le Vigan, village départ.


En général, les courses du Ceven’trail sont organisées en avril mais la Covid a eu raison cette année de l’organisation. Cependant, l’événement a pu être maintenu grâce à un report le week-end du 9 octobre.

            C’est ainsi que j’ai pu m’inscrire courant juin, ayant par ailleurs la ferme intention de découvrir les Cévennes du même coup.

            Mon choix se portera sur le 63 qui représente une petite progression :

-          51 km était ma distance la plus longue à ce jour

-          Et surtout j’en étais resté à 1300 D+… Donc un défi de plus du double est largement suffisant.

 

Le 100 km/4100D+ semblait trop ambitieux et le 42/1400 ne représentait pas une progression conséquente.



  Un petit mot sur la préparation…

 

Je ne me suis pas embêté m’inspirant grandement d’un plan tiré d’un bouquin pour la prépa d’un 80 km.

3 à 4 sorties par semaines pour une moyenne de 45 km/semaine pendant 2 mois et demi. C’est une moyenne car il y a eu par exemple un week-end choc avec 60 km en 2 jours et des semaines à 30.

La prépa a été axée sur du long et sur du dénivelé (enfin avec ce qu’on peut faire dans la région quoi…). Merci au club CNSSC au passage d’avoir participé à cette prépa via les nombreuses sorties proposées.

J’ai posé une semaine de vacances et mon père m’a rejoint afin de profiter en même temps de la semaine et visiter un peu le coin.



Le matin de la course et le matériel

 

Le départ est fixé à 11h00 du matin le samedi 9 octobre. Réveil tranquille donc au AirBnB vers les 8h00. Une nuit correcte pour une fois à peu près 7h de sommeil.

Au petit-déjeuner, mon grand classique : bol de fromage blanc, muesli, fruits secs et bananes avec du café et un jus de citron pressé. J’ai le temps de digérer, je remplis donc bien le ventre. Inutile de préciser que les jours précédant la course ont été synonymes de sucres lents en tout genre (pâtes, riz etc). Faut mettre au maximum les réserves glycémiques parait-il… Bon mon opinion est que cela apporte un gain assez marginal, mais on le fait quand même.

 

Côté matos, j’essaye de limiter le poids du sac au maximum. Il y a du matériel obligatoire : sac d’hydratation avec réserve de 1,5L d’eau minimum (flasques + poche à eau pour ma part = 2L), vêtement contre le froid, lampe frontale, sifflet, couverture de survie, réserves alimentaires. Bien sûr, c’est ma première en montagne donc je blinde niveau bouffe (au moins 5 gels, 5 barres et du comté). J’ajoute des gants, un tour de cou, un change et bien sûr mon écotasse.

Je choisis de me passer de bâtons on verra bien.



Il fallait prévoir un peu de matériel...




 La course

 

J’arrive sur la place du départ au Vigan vers 10h30. Je suis zen, prêt à partir pour une grande aventure, la première de ce genre. Voici le profil de la « balade » du jour :




         En rouge, les barrières horaires sont indiquées. 4 ravitos donc : Km 15 à Arre, Km25 en haut du Quintanel (point culminant du parcours), Km42 au Belvédère de Blandas et Km52 à Bez. A noter qu’il y a 17 km entre les deux ravitos du milieu… A prendre en compte au moment de recharger les réserves.


Il y aura 180 partants pour cette édition. Tout le monde a hâte d’en découdre. Je parle avec un gars avant le départ. Il vise un top 10 au scratch… OK on vient pas pour les mêmes raisons.

Enfin la fanfare locale donne le départ. On part au petit trot tranquillement. Il y a un petit kilomètre dans les rues de la ville pour s’échauffer.

Mais arrive vite la première côte à la sortie du village, la montée d’Aulas. Il y a des bouchons. Ca monte en file indienne en mode randonnée. Ca me convient de toute façon je voulais partir prudemment. Par contre, certains sortent déjà les bâtons ça m’inquiète… Bon la pente n’est pas hyper raide mais je me pose des questions sur leur utilité plus tard. On monte de 100m environ puis après être sorti du lieu-dit d’Aulas, première grosse montée en la personne du Col de Mouzoulès. On va grimper de 600m environ. C’est la première fois que je monte aussi longtemps : par chez nous c’est plutôt 80 max… Je reste avec un petit groupe qui monte bon train. J’essaye de pas trop entamer mes réserves mais j’ai pas trop de repères c’est pas évident. Je me retrouve en duo avec un mec portant un t-shirt Grand Raid de la Réunion finisher. Attends minute mon ami tu es sûr que c’est une bonne idée de suivre le rythme de ce mec ? Je lève un peu le pied et laisse un autre groupe me rattraper.


Au sommet les premiers paysages sont à couper le souffle :



Une fois au sommet, que dire...?


Je vais pas trop mal. Je prends le temps de manger en haut puis de bien m’hydrater. Petite surprise ça monte encore un peu (100m environ) histoire de poursuivre l’effort…

 

            Rien de comparable cependant avec la suite et la longue descente vers Arre qui va s’avérer être un véritable calvaire. Très technique, avec beaucoup de racines et de gros cailloux, ma progression est lente. Je me fais doubler de partout. Je ne suis vraiment pas aguerri à ce genre d’exercices, je dérape sans cesse. Mais voilà qu’au loin je vois un couple de trailers qui descend moins bien que moi… Ca existe ça ?? Ah mais attendez ils sont sur le 100 et ont déjà 50 dans les jambes (ils rejoignent notre parcours après leur première boucle). Bon cela fait quand même deux personnes que je double. Par contre, mes quadriceps morflent déjà.

 

            15ème kilomètre, l’heure du premier ravitaillement à Arre. Environ 900 de dénivelé positif déjà avalés et environ 2h10 de course (barrière horaire : 2h45, ça passe large). Une pause de 10 minutes ici, je ne m’attarde pas. Je remplis les flasques, je mange salé (mon petit plaisir, pain + comté).


            Après 2 ou 3 kilomètres de plat, où il fait bon récupérer, on entame le second gros morceau avec la montée vers Le Quintanel, point culminant du parcours. On va monter de plus de 700m tout de même et c’est l’heure la plus chaude de la journée. Le cardio monte vite… et l’absence de bâtons sur les pentes les plus sévères se fait ressentir. Cependant, je monte en bonne compagnie avec deux trailers sympas dans la même galère que moi. Une fois au sommet, un haut plateau jusqu’au ravitaillement avec une nouvelle fois de magnifiques paysages. Le moral est bon, les sensations sont bonnes surtout en regardant ma montre : déjà 1700D+/2600 en 25 bornes… Ne reste donc « que » 900 en 38. Easy quoi pensais je alors. J’ai mis un peu moins de 4h30 à atteindre ce ravitaillement. Il faut penser à bien recharger les batteries et à remplir le sac. Le prochain point est loin, au 42e KM.


Pour y parvenir d’abord, une longue promenade de 5 km sur les Crètes avec une vue splendide sur le Cirque de Navacelles :





            Il ne faut pas avoir le vertige. A 1m à peine du chemin caillouteux mais heureusement plat, il y a le ravin. Néanmoins, c’est pas trop technique donc ça passe… Du moins le croyais-je. Soudain, sur un sentier anodin au 30e km, sans le moindre caillou, je me prends une racine et tombe lourdement. A première vue, rien de cassé, mais une chute n’est jamais anodine. Ca chauffe un peu au niveau des mollets.. Début de crampes ? Allez je bois un coup, on est à mi-course, on relativise. Une gentille traileuse me file une Sportéine et c’est reparti.

 

            S’en suit une descente plutôt facile, même bitumée par endroit. Je reprends mes esprits petit à petit. En contrebas, on rejoint un petit cours d’eau sublime que l’on va un peu longer. 



On ne résiste pas à s'arrêter un temps...



On joint ainsi la 3e difficulté du jour, la terriblement réputée Montée du Belvédère de Blandas. Les bénévoles comme les coureurs ayant déjà participé m’invitent à la redouter… La décrivant comme terrible et usante. Courte mais hyper pentue. La montée se fait en mode Alpe d’Huez dans un premier temps… Une série de virages et beaucoup de cailloux. Mais une fois arrivé au sommet, je suis étonné que cela soit déjà terminé, c’était bien plus facile que prévu et peu pentu au final. Mais tu parles… Ce n’était que l’échauffement ! Il reste en fait après 100m sur une petite route, un véritable mur d’1,2 km environ avec des pentes affreuses. Pas de bâtons je galère mais tente de suivre deux anglais qui tiennent un bon rythme. Ils me lâchent un peu sur le haut mais je m’en tire pas trop mal. Par contre, j’ai dépensé énormément d’énergie. Je me sens assez bizarre au sommet, j’y ai forcément laissé des plumes.

 

Après 1 km de plat, arrive le ravito du 42e. Nous avons couvert 2200 D+ et j’en suis à environ 7h de course. Franchement j’avance bien pour l’instant je suis content. Je me change en premier lieu. J’enfile les manches longues sous mon t-shirt et un tour de cou. Du sec, ça fait du bien et il commence à faire plus frais ! Ensuite, les choses se compliquent… C’est un moment fatidique pour se nourrir convenablement et bien boire. Or, absolument rien ne passe… Sucré liquide ou solide me dégoûte. Pas plus envie de salé… Tout juste si j’arrive à boire un Coca et un verre d’eau. J’attends un peu mais la sensation ne passe pas. C’est assez catastrophique à ce stade. Bon je choisis d’y aller me disant allez il n’y a que 10 km jusqu’au prochain ravito et c’est du plat et du D-. Au pire j’ai encore de la réserve sur moi…


J’arrive à trottiner encore quelques kilomètres sur le plateau jusqu’au 47e kilo. Puis survient une descente en lacets vers Bez et le prochain ravito. Peu pentue, pas très difficile mais mes quadriceps n’ont plus de jus. C’est le drame. Je souffre énormément et descend en piétinant. Je m’assois un peu et sors ma frontale. Je contemple le bal des frontales dans la descente, c’est plutôt un émerveillement quand même. Et je repars… Je ne fais que perdre des places évidemment. Je parviens à manger un gel mais rien n’y fait. Une douleur atroce à une cote droite vient s’ajouter aux pépins physiques.

 

J’arrive tout de même en bas. Et la portion bitumée me fait du bien où je peux même recourir un peu et retrouver un petit groupe. Un bénévole nous aiguille mal et on perd 5 à 10 minutes, rien de bien grave : voici enfin le ravito du 53e km. Je prends le temps de me reposer. J’arrive à manger… Soupe à l’oignon locale et fromage. Je m’étire un peu aussi. Et je fais le point. Reste une dizaine de kilomètres, une montée de 350D+ et c’en sera terminé. Ma montre indique 9h00 de course pour un délai de 10h15 à cet endroit. Me reste donc 3h pour finir on est large… 


La montée se fait à la sortie du ravito et en fait, comme toutes les autres, ça se passe plutôt bien. Je monte à un bon rythme avec une fille sympa qui me tire et m’encourage. Au sommet, nous en avons terminé avec le D+ mais j’ai un peu peur de ce qui va suivre… Je redoute la descente. Ma compère me dit de la suivre elle aussi a les genoux en compote mais elle avance plus vite malgré tout. Je la laisse filer. Je descends tout doucement, même problème que la descente précédente. Les quadriceps ne répondent plus.


En bas, il reste 4 km très roulants jusqu’à l’arrivée. A bout et exténué, je ne parviens même pas à courir et active la marche rapide jusqu’au bout. Je mets beaucoup plus de temps que prévu bien sûr mais qu’importe… Voici enfin la ligne. Pour le symbole, je la passe en trottinant.

 

J’aurais mis 11h20 et quelques pour couvrir les 63 km… Mais la libération est là. La condition physique, surtout en descente, n’a pas été au rendez-vous. Les problèmes d’alimentation n’ont pas aidé non plus. Je suis lessivé à l’arrivée mais heureux… Je finis loin au scratch (130e sur 151 classés pour 28 abandons) mais qu’importe, il y a tout de même une grosse satisfaction à tout ça (même deux) : une première expérience en montagne et un mental qui a tenu le choc jusqu’au bout. Vraiment content pour ça.



Epilogue

 

A l’heure où j’écris ces lignes, 24 heures se sont écoulées depuis l’arrivée. Nauséeux toute la journée, j’ai commencé à retrouver l’appétit ce soir (une bonne assiette de frites…). J’ai perdu 3,5 kg en une seule journée (5000 kcal). J’ai beaucoup demandé à mon corps et il me le fait comprendre, voire payer : courbatures monstres aux quadris et aux abdos, état second et vomitif etc.

Mais bien au-delà du résultat, l’expérience a été unique et cela fait plaisir de trouver un sens à sa vie en passant ce genre d’épreuves. Surtout en n’étant pas sportif pour un sou de base.


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